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Privatisation : le marché du recouvrement bientôt ouvert !

Deux techniques quasiment opposées existent pour privatiser une activité publique :
1) dégrader le service rendu à l’usager, pour faire croire que la sphère publique n’est pas capable de gérer le service, auquel cas les entreprises du secteur privé sont présentées comme la panacée.
2) uniformiser les procédures et simplifier le travail à outrance, afin de vider de son sens la compétence des agents publics : aucune spécificité ne justifie alors que le service ne soit pas confié au privé. Il est évidemment fait abstraction de la sécurité des données et de leur confidentialité.

Notre gouvernement, désireux d’innover, a choisi la seconde option concernant le recouvrement des créances publiques, notamment celui de l’impôt et des recettes des collectivités. On pouvait déjà lire dans le rapport « indépendant » CAP 22 publié en début d’année 2018, que le gouvernement, prétextant des économies budgétaires, ne cachait pas ses intentions quant à la privatisation du recouvrement.
Mais les modalités de mise en place de cette privatisation vont encore plus loin que ce que nous pouvions entrevoir. La création de points de contact uniques, engagée à travers le Nouveau Réseau de Proximité (NRP) est à mettre en perspective avec un ensemble de mesures déjà décidées.

Nous avons déjà une harmonisation de l’accès informatique aux services publics, avec la création du dispositif France Connect. Il s’agit d’un accès aux espaces usagers en ligne de plusieurs grandes administrations, comme les impôts, la CAF, la CPAM, etc. et tout ceci avec un seul identifiant et un unique mot de passe. C’est un système similaire aux gestionnaires de mots de passe qui existent sur les navigateurs internet.

Le NRP prévoit également la création de services de gestion comptable, usines de traitement de masse. Rappelons-nous aussi des services facturiers qui sont voués à traiter la majorité des transactions financières de la DGFiP (recettes comme dépenses), dans lesquelles la séparation ordonnateurs/comptables est mise à mal.

Au vu de tous ces indices, il n’est pas farfelu de penser que tous ces regroupements ne vont pas s’arrêter là. Tout converge vers des centres uniques de recouvrement inter- administrations, avec un accès unique pour le contribuable. Vous pourrez payer votre facture d’eau, vos entrées de piscine ainsi que votre impôt sur le revenu au même endroit. Les poursuites des mauvais payeurs se feront par un service unique, une même saisie sur compte bancaire pourra être effectuée à la fois pour un indu d’allocation familiales et un impayé de facture d’hôpital.

Cette analyse est effectivement corroborée par le rapport CAP 22, qui cite dans ses objectifs : « renforcer l’efficience des organismes en charge du recouvrement afin d’aller progressivement vers un acteur unique du recouvrement dans les sphères fiscale et sociale » (page 85).
Et nous aurons un magnifique package qui pourra être livré clé-en-main à l’entreprise privée proposant la meilleure offre, c’est-à- dire la moins chère.
Ne vous inquiétez pas, elle se rémunérera à la fois en facturant des frais au contribuable (c’est déjà le cas des huissiers privés utilisés par le Trésor), et à la fois en exploitant les données personnelles issues des dossiers qui lui sont confiés.

Orientations stratégiques (des sondages...)

Notre ministère n’est jamais à court d’arguments pour justifier du bien-fondé du fameux NRP. J’en veux pour preuve le récent sondage BVA sur la perception du Nouveau Réseau de Proximité, daté d’octobre 2019, qui a été diffusé récemment sur Ulysse national.
On pourrait naïvement penser, sans chercher plus loin, que l’opinion qu’a le public du projet NRP est plutôt bonne au vu du sondage.
Mais les choses ne sont plus tout à fait les mêmes lorsqu’on y regarde de plus près, l’objectivité des questions posées restant pour le moins discutable !
63% des sondés répondent que la possibilité de payer ses impôts auprès d’un buraliste est une bonne initiative. Les réponses auraient-elles été les mêmes en demandant : « Pensez-vous que supprimer les trésoreries et les paiements auprès des Centres des Finances Publiques pour les remplacer par des buralistes est une bonne idée ? »

Permettez-moi d’en douter..

La pertinence des réponses prête également à sourire, lorsque « par téléphone » est l’une des réponses possibles concernant le moyen préféré d’effectuer sa déclaration de revenus.
Oui, vous avez bien lu, il ne s’agit pas de smartphone mais bien de téléphone ! Je vous laisse imaginer, si bien sûr une telle chose était possible, les conversations lors de la campagne déclarative avec des contribuables dont il est impossible de s’assurer de l’identité et doublé de la qualité pour le moins médiocre (et c’est un euphémisme) de nos lignes téléphoniques...

Non vraiment, rien ne va dans ce sondage très orienté qui au final semble n’avoir qu’un seul but, légitimer le NRP à n’importe quel prix....

Article publié le 2 février 2020.


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