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Fiscalité : le prélèvement à la source a vieilli...

Depuis une dizaine d’années, l’administration fiscale s’est modernisée, et le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu a pris des rides. Certains des arguments historiquement avancés en sa faveur, comme la simplicité, ont perdu de leur poids, analyse le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) dans un rapport présenté jeudi 16 février. En l’état de notre fiscalité, cet organisme rattaché à la Cour des comptes écarte l’opportunité d’une telle réforme.

Adopté par tous les pays membres de l’OCDE à l’exception de la France, de la Suisse et de Singapour, le prélèvement à la source - on parle aussi de retenue à la source - présente pour le contribuable l’avantage de la simplicité : il n’y a pas de formalité à accomplir auprès du fisc. Mais à l’heure de la déclaration pré-remplie, utilisée par 90% des contribuables, de la diffusion des moyens électroniques de paiement et avec la mensualisation, qui bénéficie désormais à 73% des contribuables, il ne constitue plus un progrès significatif du point de vue de la déclaration ou du paiement de l’impôt.

La retenue à la source reste avantageuse pour les contribuables (30% d’entre eux) qui subissent des pertes importantes de revenus, par exemple lorsqu’ils perdent leur emploi, partent à la retraite ou se séparent de leur conjoint. Avec elle, l’année de décalage - on paie en 2012 son impôt sur les revenus de 2011 - disparaîtrait et l’impôt serait automatiquement ajusté aux revenus. Le fisc propose des facilités en cas de difficultés économiques (délais de paiement et modulation des acomptes) mais, observe le CPO, elles sont « trop peu utilisées car sans doute encore trop complexes ou méconnues. »

Du point de vue des finances publiques, le prélèvement à la source permet en théorie d’améliorer le rendement de l’impôt. Dans les faits, en France, le taux de recouvrement de l’IR dépasse 99%... Le CPO doute par ailleurs qu’il puisse faire faire des gains de productivité à l’administration car toute une série de tâches resterait à accomplir, comme le suivi et le recoupement des situations des contribuables, le contentieux ou le contrôle fiscal. La retenue à la source pourrait même, à son avis, engendrer des coûts supplémentaires.

Le CPO s’est aussi demandé à quelles conditions un tel système pourrait être introduit en France, sachant qu’il existe déjà pour les cotisations sociales, les contributions sociales et pour certains prélèvements fiscaux (soit entre un quart et la moitié du total des prélèvements obligatoires).
La simplification de l’impôt sur le revenu, assure l’ancien Conseil des impôts, n’est pas nécessaire à la mise en œuvre de la retenue à la source, en revanche, certains revenus (salariaux et de remplacement) s’y prêtent mieux que d’autres (comme les revenus du capital) et, dans tous les cas, des régularisations s’imposeraient l’année suivante.

Dans l’hypothèse de l’impôt retenu à la source, le choix de l’entreprise comme tiers payeur pour précompter l’impôt est la solution la plus naturelle. Elle peut toutefois coûter cher aux entreprises, notamment aux PME, et les informations transmises aux entreprises doivent rester confidentielles. « La crainte que l’employeur puisse tenir compte de ce qu’il sait des revenus de ses salariés dans sa politique salariale ou en matière d’effectifs est un vrai sujet », a fait valoir le premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud.

La transition d’un système à l’autre reste délicate. L’hypothèse d’une double imposition n’étant guère concevable, deux options existent : la technique du lissage sur plusieurs années, à laquelle a recouru le Royaume-Uni de 1944 à 1947, ou celle dite de l’année blanche, donc de l’effacement de la dernière année d’imposition précédant le prélèvement à la source. Cette dernière solution soulève toutefois quelques difficultés. Quel sort par exemple réserver aux dépenses fiscales ? Comment limiter les abus et les comportements opportunistes ? Pour ce faire, le rapport propose par exemple de réintégrer les plus-values dans la première année de retenue à la source.

Le CPO présente comme une alternative possible au prélèvement à la source le basculement de l’impôt sur l’imposition des revenus courants de l’année. Avec un tel système, les acomptes d’impôt payés chaque mois (ou à chaque tiers provisionnel) au cours de l’année n seraient dus au titre de l’année n (et non pas n- 1 comme aujourd’hui). Une fois l’impôt final liquidé, en septembre n+1, une régularisation pourrait intervenir.
L’imposition des revenus courants présente trois avantages importants. Comme la retenue à la source, elle permet de supprimer le décalage d’un an entre la perception des revenus et le paiement de l’impôt correspondant. Et, à la différence de cette dernière, il n’y a pas de tiers payeur ni de rupture d’égalité entre contribuables, tous se voyant attribuer un système d’acomptes au titre des revenus courants.

Ironie du sort, c’est à Didier Migaud, auteur d’un rapport parlementaire de 2007 favorable au prélèvement à la source et à la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, qu’est revenue la tâche de présenter le rapport de l’ex-Conseil des impôts. Le CPO prend d’ailleurs soin d’observer que la retenue à la source pourrait très bien s’envisager dans le cadre d’une réforme fiscale globale et profonde de l’imposition des revenus, mais que celle-ci n’était pas l’objet de son rapport.

source : Le Monde

Lien : http://bercy.blog.lemonde.fr/2012/02/16/fiscalite-le-prelevement-a-la-source-a-vieilli/ (cliquer ICI)

Article publié le 26 février 2012.


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