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La complainte d’une campagne

Le facteur nous a laissé une drôle de missive écrite par un agent des finances après une longue journée de réception. En guise d’éditorial et compte tenu d’une actualité devenue détestable et nauséabonde, nous avons préféré publier ce courrier.

Monsieur le redevable, Madame la contribuable, Mademoiselle la citoyenne. Si je me permets de t’écrire et de te donner encore un titre de civilité, c’est que ces titres sont en train de disparaître de ta déclaration d’impôt sur le revenu. Sache que tu es en train de devenir des déclarants 1, des déclarants 2. Pendant longtemps nous avions pensé que l’état s’essayait à la poésie surréaliste avec ta déclaration d’impôt sur le revenu. Inventant de nouveaux concepts, imposant de nouveaux mots tout en faisant disparaître d’autres, créant de nouveaux sigles et de nouvelles normes, mais aujourd’hui nous faisons face à une forme d’art inconnue.

Sache qu’à chaque début d’année, nous agent de ce ministère redoutons la nouvelle loi des finances. Plus les années passent, plus nous sommes en droit de penser que les hauts fonctionnaires et les législateurs ne font pas que marcher sur les moquettes épaisses des parlements nationaux. Non ils la fument tous et sans exception ! Ils sont pris d’une frénésie de réécriture des textes, faisant preuve d’une logique kafkaïenne, multipliant les causes et les conséquences. Cette année, chers déclarants, ils ont explosé tous les records et à force nous n’y pipons plus grand-chose.

Sache que ce que nous allons te dire oralement au fond des yeux dans les boxes de réception (on appelle cette technique une Cahuzac), nous le faisons à l’insu de notre plein gré.

En effet :

  • Ce n’est pas nous, agent de base, qui avons inventé le bouquet de travaux avec ses multiples taux de déduction, ses trois dates, ses 6 catégories de travaux, ses actions en duo, en triple, en solo, le tout saupoudré de nouvelles normes environnementales.
  • Ce n’est pas nous, agent de base, qui avons décidé de créer 207 cases supplémentaires pour ta déclaration d’impôts sur le revenu 2012. Ce n’est pas par pur hasard que ta 2042
    complémentaire est passée en quelques années de 4 à 10 pages.
  • Ce n’est pas nous, qui sur les revenus fonciers rajoutons chaque année une autre couche à ces mille feuilles fiscales. ??tonnant revenu foncier, avec son Malraux, son Perissol, son Scellier, ses Robien, ses Borloo, ses Besson, et maintenant son Duflot. Le tout se cumulant les uns aux autres. Si tu nous vois au bout de quelques heures de réception, emètre un souffle de dépit, ce n’est pas toi, c’est notre cerveau qui hurle pour se libérer de ce carcan impénétrable.
  • Ce n’est pas nous, déclarant étranger, qui avons décidé de te taxer aux prestations sociales avec des conditions d’appartenance à notre sécu aussi claire qu’une rivière boueuse, des conditions d’exonération sur lesdites prestations faisant appel à l’année n-2 et 4 taux différents.
  • Ce n’est pas nous qui multiplions les rabots, qui enlevons sur ta notice simplifiée le mode de calcul.
  • Ce n’est pas nous, qui faisons passer la brochure pratique de l’impôt sur le revenu de 330 pages en 2011, à 344 pages en 2012 et à 381 pages en 2013.
  • Ce n’est pas nous, qui avons décidé de retenir jusqu’au 30 avril tes annexes papiers (2044, 2042C) te faisant revenir de nouveau à notre accueil débordé.

Sache pourtant que nous répétons à satiété cette phrase à nos élites en guise de conseil. « Pour qu’un impôt soit compris de tous, il faut une condition, une seule et unique condition. Il faut qu’il soit compréhensible pour l’ensemble de la population et notamment par les agents de ce ministère. »

Sache que chaque jour qui passe, nous nous demandons si le fameux esprit cartésien français cité parfois par ces grands esprits n’est pas qu’une légende, qu’un mythe.

Pour conclure, chers déclarants tu n’as pas fini de te précipiter dans nos accueils bondés. Si tu regardes bien et si tu laisses courir ton imagination, tu pourras voir ces milliers de questions en suspension cherchant désespérément une réponse logique.

Alors nous te disons avec compassion : « Bienvenue dans notre galère, chers camarades d’infortune ».

Source : la CGT Finances Publiques de la Creuse

Article publié le 21 mai 2013.


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