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Le microcrédit initiateur d’emplois

Le microcrédit n’est pas seulement un moyen de lutter contre la pauvreté dans les pays du Sud. Ces prêts de petits montants attribués à des exclus du système bancaire traditionnel pour qu’ils financent leur emploi se développent aussi en France. L’Association pour le droit à l’initiative économique (Adie), chef de file de ce modèle, annonce la création de près de 30 000 emplois et 25 000 entreprises en seize ans. Depuis 1990, elle a accordé plus de 20 000 crédits (5 500 l’an passé) aux persona non grata des banques françaises, chômeurs et RMistes. Des prêts de 10 000 euros maximum, sur deux ans, à un taux de 5,2 %. Un pari généreux et pas si risqué : 94 % des microemprunteurs remboursent intégralement les prêts. Pendant la semaine du microcrédit, du 31 mars au 7 avril, l’Adie a vanté les mérites du prêt solidaire en organisant forums et collectes de projets dans toute la France. A grand renfort de bénéficiaires de crédits, venus témoigner.

Les emplois sponsorisés par le microcrédit sont surtout créés dans le commerce et les services. Epicerie, dépôt-vente, auto-école ou encore société d’entretien, comme pour Seluba Jassigui. Il y a sept ans, il touchait l’allocation de solidarité spécifique. Aujourd’hui, il a sa propre entreprise de nettoyage avec trois salariés, grâce au coup de pouce de 3 050 euros de l’Adie. Seluba n’est pas une exception : les trois quarts des personnes financées réussissent leur réinsertion. 64 % des entreprises créées avec l’Adie existent toujours au bout de deux ans. Un exploit compte tenu du profil des créateurs d’entreprise : 2 % sont illettrés, 16 % savent à peine lire et écrire.

Accompagnement. Pour obtenir un tel résultat, l’Adie (291 salariés et 800 bénévoles) privilégie l’accompagnement. « Au début, nous sommes allés chercher nos clients dans les soupes populaires, les cages d’escalier », se rappelle Maria Nowak, fondatrice de l’Adie. Aujourd’hui, beaucoup, comme Michèle, y voient leur dernière chance. A 57 ans, elle vit de « rebond en rebond ». Elle préférerait un travail salarié et planche sur un projet de transport de personnes âgées. « Je le fais contrainte et forcée car je n’ai plus le choix, il faut bien vivre. »

Partant du constat que « cinq millions de Français sont exclus du crédit », Maria Nowak a importé le concept du Bangladesh. « Dans les pays du tiers-monde, le crédit se fait dans le secteur informel, commente Henry Rouillé d’Orfeuil, président d’une coordination d’ONG. En France, c’est évidemment impossible. » Il a fallu un long travail de lobbying de l’Adie pour obtenir un amendement de la loi bancaire en 2004. Désormais, l’association peut emprunter directement auprès des banques, au lieu de servir de simple intermédiaire.

Garantie. Pour Maria Nowak, le microcrédit ne peut se développer qu’avec l’appui des banques. « Elles commencent à découvrir que cela peut être un marché gagnant gagnant », affirme-t-elle. Un discours qui inquiète Dhafer Saidane, d’Epargne sans frontières, peu convaincu des vertus d’un changement d’échelle. Au-delà d’une certaine taille, « les prêteurs perdent le contrôle de la dimension sociale non marchande qu’ils défendent ».

Le ministre de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, a profité de la semaine du microcrédit pour annoncer la création d’un « fonds de cohésion sociale ». Doté de 73 millions d’euros sur cinq ans, il pourrait développer le microcrédit en assumant une partie de la garantie des prêts.

Journal Libération

Article publié le 5 avril 2005.


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